Lettre ouverte du groupe Eelv Rouen,
Madame, Monsieur,
Nous avons décidé d’écrire cette lettre ouverte au lendemain du remaniement ministériel décidé par François Hollande, débauchant des écologistes au gouvernement.
Chacun aura compris qu’il ne s’agit pas d’un retour collectif du parti écologiste au gouvernement puisque EELV désapprouve le choix de Barbara Pompili, Jean-Vincent Placé et de notre ex secrétaire nationale Emmanuelle Cosse, mais d’une manœuvre politicienne de François Hollande pour espérer sa réélection.
On sait tous que le Président a renié ses engagements en matière d’écologie et même s’il parle d’écologie, nous avons tous constaté qu’il n’avait pas fait ce choix dans la réalisation concrète des politiques menées par le gouvernement. Nous ne faisons pas nôtre l’idée répandue dans les médias que la COP 21 fut un succès éclatant, malgré quelques avancées sur les objectifs mondiaux au moment de la signature qui viennent d’être remis en cause par le vote récent du congrès américain qui empêche les U.S.A de tenir leurs engagements .
Mais s’appuyant sur la COP 21 qui avait lieu à Paris, François Hollande aurait pu marquer son intérêt réel pour ce sujet en annonçant dès l’ouverture de cette conférence mondiale sur le climat l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, ce grand projet inutile dans une région où il existe déjà un aéroport.
Non, l’écologie politique n’est plus au gouvernement. Cécile Duflot et Pascal Canfin, avec l’accord d’EELV ont essayé puis quitté ce gouvernement, car lucides et écologistes, ils ont constaté que le duo Hollande/Valls avait décidé de ne pas respecter les engagements qui avaient rassemblés la gauche et les écologistes lors du deuxième tour des élections présidentielles.
Nous savons que ce n’est pas avec François Hollande, ni avec Manuel Valls que nous ferons de l’écologie pour transformer la société. Et l’annonce dernièrement de la remise en cause du droit du travail et l’allongement annoncé de la durée du travail proposé par le gouvernement tourne le dos à tout le débat sur la réduction du temps de travail, cher à la gauche et aux écologistes !
Oui, nous pensons que l’écologie doit transformer concrètement la société et ne doit pas servir de vernis écolo à une sociale-démocratie engluée dans la gestion d’un système démocratique, économique et social à bout de souffle.
L’écologie aujourd’hui est dans les luttes de terrain, comme le montre le film « Demain » qui rencontre, jour après jour, le succès dans les salles de cinéma, comme cela a été le cas à Rouen dernièrement.
L’écologie de transformation concrète est dans l’agriculture de proximité et la qualité alimentaire avec le succès des AMAP ; elle est dans Alternatiba, elle se trouve dans les associations qui défendent la place du vélo, les bâtiments à énergie positive, l’intergénérationnel….
L‘écologie de transformation est aussi localement chez les élus et militants EELV, qui comme à Rouen et ailleurs ont proposé et mis en place les cantines municipales en régie publique afin de contribuer à développer les filières en bio ; elle est dans la création des conseils de quartier en 1995 à Rouen, sous l’impulsion des écologistes, alors que la loi ne nous obligeait pas à le faire, et ce afin de contribuer à solliciter la participation et la co-élaboration des citoyens à la décision politique, l’écologie de transformation , elle est dans la redéfinition de la politique de la petite enfance sur l’ensemble de la ville.
L’écologie de transformation, comme à Grenoble, est aussi dans la reprise de l’eau en régie publique grâce à la mobilisation d’un collectif initié par les Verts sur le sud de Rouen, qui concerne 150.000 personnes. Elle est aussi dans la mise en place du zéro-phyto dans l‘entretien des espaces publics et des espaces verts, et l’accès aux pelouses des parcs de la ville en 1995 qui était jusqu’alors interdite par la droite.
L‘écologie de transformation c’est d’avoir contraint un grand opérateur de chauffage urbain à rembourser aux citoyens les surfacturations dont il s’était rendu coupable, l’écologie de transformation c’est aussi le travail engagé concernant les économies d’énergie dans les bâtiments municipaux, l’écologie de transformation, c’est militer depuis des mois pour la construction d’une piscine écologique à la Grand’Mare , c’est aussi la réalisation de la ligne Fast 1 et la réalisation des sites propres de bus.
L‘écologie de transformation c’est d’avoir empêché un magasin de matériel de jardin de détruire… une zone humide à Repainville et la réalisation d’un parc naturel urbain sur ce site par la méthode de la co-élaboration. L’écologie de transformation c’est le soutien de l’économie sociale et solidaire, qui permet de recréer de l’utilité sociale et de la démocratie dans l’économie, tout comme l’impulsion d’une monnaie locale sur Rouen.
Nous avons probablement commis l’erreur de ne pas assez le dire : oui, tous les sujets cités en amont ont été des dossiers proposés par les écologistes, défendus par les écologistes ; qui figuraient dans nos programmes électoraux mais pas dans celui des socialistes ou des communistes, à l’époque ! Quant à la droite….
L’écologie politique est donc bien vivante et nous ne sommes pas sourds, nous entendons ici ou là quelques responsables socialistes se réjouir du coup politique fait par Hollande contre EELV . Mais nous sommes toujours là et nous saurons trouver le moyen de faire vivre l’écologie politique de transformation, par exemple avec des consom’acteurs ou des citoyens impliqués dans de nombreux territoires.
A Rouen, les scores successifs des écologistes depuis 1989 indiquent que les rouennais veulent de l’écologie dans les politiques publiques, et notre dernier score aux municipales, avec la liste Citoyenne et Écologiste a confirmé l’implantation des écologistes sur la ville, tout comme les initiatives citoyennes que nous avons contribué à créer et/ou que nous soutenons.
Nous avons initié à Rouen une démarche citoyenne qui a fonctionné. La moitié des élus de notre groupe à Rouen ne sont pas adhérents d’EELV, mais ils sont attachés aux valeurs de solidarité, de citoyenneté et d’écologie. Notre groupe prouve tous les jours que l’écologie politique, concrète, est bien vivante et apporte, par la co-construction avec les citoyens des réponses opérationnelles au mieux vivre ensemble.
Ce que nous expérimentons à Rouen, en ne cumulant pas les mandats et en gardant une activité professionnelle qui reste, pour tous les élus de notre groupe, notre principale source de revenus, garantit ainsi notre liberté d’expression et nous permet d’être des citoyens engagés dans leur cité, ancrés dans les réalités de la vie quotidienne.
Pour autant, si nous avons investi la politique locale, nous pensons indispensable l’existence de mouvements politiques nationaux et européens pour généraliser et pérenniser les expériences positives locales ; mais très certainement sous des formes à renouveler.
EELV n’est pas le seul parti à être en difficulté, nous avons assisté aux débats très durs qui règnent au sein du Parti Socialiste, nous nous souvenons du départ du gouvernement de Benoit Hamon, d’Arnaud Montebourg, d’Aurélie Filipetti, de Christiane Taubira, nous avons lu le texte signé par Martine Aubry tout récemment, nous voyons les grandes manœuvres à droite à la veille de leurs primaires, nous savons que le Front de Gauche a éclaté avec la candidature solitaire de Jean-Luc Mélenchon, nous avons vu les déchirements au sein du FN.
Personne aujourd’hui ne peut penser incarner une alternative sérieuse face au risque anti-démocratique de l’extrême droite et de la droite extrême…et reprendre leurs thématiques comme la déchéance de nationalité, c’est préparer le terrain à leurs victoires.
Ça, nous ne le voulons pas !
Il nous faut changer d’ère et refonder l’écologie politique et la gauche, nous souhaitons contribuer à faire émerger un nouveau projet Ecologiste, Solidaire, Citoyen, sur les bases d’une recomposition politique dépassant les faillites actuelles et faisant barrage à la droitisation de la société. Nous ne le ferons pas seuls et heureusement de nombreuses énergies politiques, syndicales, associatives, citoyennes, entreprenariales, artistiques commencent à converger pour cette mutation culturelle.
L’avenir est à l’écologie de transformation, avec vous !
Stéphane Martot, Secrétaire du Groupe Local EELV Rouen
Jean-Michel Bérégovoy, Pierre Bouchon, Guillaume Cousin, Yann Devin, Martine Fauchard, Catherine Goode, Jean- Pierre Lancry, Benoit Leclerc, Francoise Lesconnec, Laurence Pot et Nicole Sanchez, Membres du Bureau du Groupe Local EELV ROUEN